EXPO-YSL

YSL / Doucet : L’appartement idéal ?

L’habit ne fait pas… Les deux couturiers étaient aussi collectionneurs. Un point commun que la Fondation Pierre Bergé- Yves Saint Laurent souligne aujourd’hui, au travers d’une nouvelle exposition.

 

Le visiteur est invité à franchir deux seuils parisiens, celui du 33, rue Saint-James, et celui du 55, rue de Babylone. Ces deux adresses correspondent respectivement à la dernière demeure de Jacques Doucet (1853-1929), ainsi qu’à l’appartement qu’Yves Saint Laurent (1936-2008) partageait avec son compagnon et associé Pierre Bergé.

IMG_9633_2Picasso wall

Passés quelques Picasso, un Man Ray, un Manet et des masques africains, une question taraude pourtant le spectateur : où suis-je ? Aussi louable soit-elle, cette sensation de dépaysement est propice à la déconcentration. Au lieu d’apprécier les œuvres, le public se demande constamment où il met les pieds. Suis-je arrivé chez Saint Laurent ? Où suis-je encore chez Doucet ? La couleur des cimaises est un indice aussi faible que la provenance des œuvres. Oiseuse s’avère toute quête de points de repère, à moins de s’en référer au fascicule distribué à l’entrée. Encore faut-il l’avoir ! Autrement, on est voué à errer entre deux univers aux frontières incertaines. Bonjour le flou artistique !

IMG_9640Andy Warhol wall

Le doute une fois dissipé – les trois premières salles sont consacrées à Doucet ; les deux dernières, à Saint Laurent -, une seconde visite s’impose, d’autant plus que l’espace est restreint, pour ne pas dire intime. Le point du fort du parcours demeure sans nul doute les œuvres. Parmi les pièces présentées, on compte des Warhol, un Rousseau, des Chirico, un Mondrian, un Brancusi… De ce point de vue-là, bien entendu, il n’y a rien à dire. Qui ne rêverait de vivre entouré de pareilles merveilles ?

IMG_9654Ambiance

Toutefois, la sélection de la Fondation Pierre Bergé Yves Laurent est-elle vraiment idéale ? Il aura fallu deux ans à Jérôme Neutres et à son équipe pour regrouper des œuvres dispersées aux quatre coins de la planète. Quel intérêt de recomposer une partie de la collection vendue en 2009 au Grand Palais ? La présence de Doucet se justifie-t-elle par le refus de certains prêts ? De même, la reconstitution de l’appartement d’Yves Saint Laurent et de Pierre Bergé n’est pas fidèle à la réalité. Si le foyer du couple était connu pour être surchargé, la scénographie de l’ensemble s’avère, à l’inverse, relativement épurée. Enfin, les deux couturiers, nés à des époques différentes, ne se sont, cela va de soi, jamais fréquentés. Autrement dit, l’exposition ne repose que sur leur passion commune pour l’art. Est-ce suffisant ? Sûrement pour les esthètes venus se repaître de palettes et de contours exceptionnels. Les autres n’ont plus qu’à faire un petit tour du côté de chez Malraux et de son musée imaginaire.

 

Jacques Doucet -Yves Saint Laurent. Vivre pour l’art, jusqu’au 14 février (la Saint-Valentin). Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent, Paris.